En janvier, je me suis rendue chez mes parents, pour commencer à préparer la célébration (prévue en août) de leurs noces d’or ! Un grand événement, qui m’impressionne considérablement !
En fouillant dans leurs albums de photos, j’ai retrouvé les photos des 50 ans de mariage de mes grands-parents à Pourcieux, et, coincé dans l’album, une coupure de presse extraite du journal
« la croix » (notre bible familiale !)
Je l’ai saisi pour le partager tant je le trouve juste !
« Un vieux couple ami m ‘a demandé récemment de célébrer avec eux, avec leurs enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants leurs 50 ans de mariage !
Emouvante fête de famille. Pendant la célébration, penchées doucement l’une vers l’autre, leurs têtes chenues me fascinaient comme une icône de lumière. Leurs visages s’auréolaient d’une telle
sereine douceur que je les trouvais divinement beaux ! J’eus le pressentiment qu’une lueur d’éternité illuminait déjà leur regard. Lui, un peu vouté, elle trottinant à ses côtés, ils furent
toute la journée le symbole vivant d’un rêve enfoui dans le cœur de chacun.
Célébrer 20, 30, 50 ans de mariage n’est-ce pas fêter une victoire de l’amour sur la morsure du temps, une victoire sur la mortelle habitude qui, parfois, enlise, banalise les sentiments les plus
grands ? Tous, petits et grands, en les regardant, tranquilles et souriants, nous contemplions un défi tranquille et puissant qui réfutait tous les clichés pessimistes ou
désabusés sur l’amour conjugal. Nous avions conscience de célébrer une espérance portée à bout de cœur qui réchauffe notre terre. Tous, jeunes ou vieux, croyants ou non, tous nous pressentions en
les voyant combien l’amour, ce dialogue des cœurs, est à la fois le bien le plus fragile et le trésor le plus sérieux de l’homme qu’il faut arracher du marécage des idéologies réductrices ou des
vaudevilles de boulevard.
Célébrer 20, 30, 50 ans de mariage, n’est-ce pas avoir su engager sa vie pour le bonheur d’un autre ? Avoir su réaliser, dans la monotonie de chaque matin qui revient, cette humble et
grandiose symphonie des gestes quotidiens ? Avoir su fréquemment se choisir et se redire « oui » car l’amour est un sacrement dynamique qui se déploie dans le temps. On devient peu
à peu époux et épouse ! L’amour conjugal est un grand manteau pour deux qui se tricote, jour après jour, maille par maille. Une déchirure n’est jamais soudaine, mais elle est souvent le
résultat de petites mailles qu’on a, négligemment, laisser sauter.
Célébrer 20, 30, 50 ans de mariage c’est avoir su ne pas rêver son amour mais l’avoir bâti au fil des jours et des ans. Avoir su refuser les caricatures de l’amour romantique qui n’existe que
dans Nous Deux ou Bonnes Soirées ! Avoir su parier sur les forces de l’amour plus fortes que les germes de divisions. Avoir cru aussi, sans doute, que le Christ est venu pour libérer
l’amour humain de ses impasses et de la fatalité du mal.
Célébrer 20, 30, 50 ans de mariage, quand les cheveux grisonnants prennent la couleur de la sagesse et que le visage ridé prend les traits de la bonté et de la douceur, c’est avoir su cultiver ce
regard neuf qui sait encore sourire des travers et s’émerveiller des qualités de chacun. C’est avoir appris à cheminer côte à côte, non plus à grandes enjambées, mais à petits pas, attentifs à ne
pas essouffler l’autre. Avoir su trouver ensemble un nouvel accord, un rythme où, sur le même chemin, chacun peut soutenir l’autre sans l’écraser. Avoir su lui être présent mais jamais
envahissant. Avoir su s’accepter différent dans la communion, égaux, dans la réciprocité du bon et du dépassement, respectueux et digne dans les concessions. Avoir su, après une dispute, se
pardonner, se sourire et s’embrasser.
Célébrer 20, 30, 50 ans de mariage n’est-ce pas avoir su, ensemble, apprivoiser la joie et la confiance, les épreuves, et l’inévitable souffrance ? Car le paradoxe de l’amour n’est-il pas de
se rendre vulnérable à l’être aimé ? Avoir su enfanter hier, et les enfanter aujourd’hui encore, des enfants qui ne nous appartiennent plus, pour les aider, les soutenir sans jamais prendre
leur place. Avoir su construire une maison toujours ouverte où chacun aime revenir comme à un port paisible et sûr pour y faire une escale de tendresse et y soigner du cœur les blessures. Maison
des souvenirs. Maison de l’amour donné et de l’amour reçu où enfants et petits-enfants trouvent un espace de liberté pour se rencontrer, rire et pleurer sans jamais se sentir jugés, pour confier
ses espoirs et ses chagrins et se sentir toujours aimés.
Célébrer 20, 30, 50 ans de mariage n’est-ce pas avoir su habiter le silence du bonheur qui n’est plus un silence vide et gêné mais une note suspendue, une respiration, une complicité intérieure
où un simple clignement de cils dit plus qu’un discours. Avoir su creuser si profond les racines de son amour qu’on n’a plus besoin du langage des mots pour se dire, se
deviner, être là présents et pressentir que cet amour jamais ne passera car il défie les frontières du temps.
Célébrer 20, 30, 50 ans de mariage n’est-ce pas avoir su cueillir et goûter chaque parcelle de bonheur qui, avec le recul du temps, prend plus de poids et de saveur ? Avoir su entretenir ces
humbles rites de l’amour : un anniversaire souhaité, un souvenir célébré. Avoir su se reprendre par le bras souvent pour aller se promener, le soir, tout simplement, gratuitement, comme de
jeunes amoureux au cours de leur premier printemps !... Ecouter, épaule contre épaule, le chant des oiseaux et du vent et y pressentir, dans le soleil couchant, la
présence de quelqu’un qui vient : ce Dieu qui, un jour, a réuni deux destins.
Découvrir que les deux cours d’eau de ces vies, descendus de la montagne de l’enfance, ont mystérieusement conflué dans un fleuve uni qui coule, aujourd’hui, paisiblement, avant de se jeter dans
l’océan immense de Dieu où cet amour mutuel atteindra sa plénitude. Voyages fabuleux pour compagnons d’éternité ! Merci Paul et Christine pour votre fidélité. Formidable leçon d’espérance
qui vaut mille débats sur l’amour conjugal. Notre monde si disloqué et en quête de points de repère a tellement besoin de vos 50 ans de mariage pour croire en la grandeur de l’homme et en la
beauté de l’amour qui dure. »
Par Michel Hubaut, franciscain